LE PROJET COMMENCE AVEC L’ÉTAT DES LIEUX

2021. Communication présentée: “Le projet commence avec l’état des lieux ” pour le séminaire pluridisciplinaire organisé par le MUCEM et l’EHESS sur la thématique « La geste technique : parler objets… par les milieux ».

PAR FLORENCE SARANO

enseignante-chercheure TPCAU

ENSA MARSEILLE

comprendre le parcours de la laine

L’ARCHITECTURE ET LA QUESTION ANIMALE

SÉMINAIRE

3 juin 2021 – EHESS + MUCEM


M

Dans le cadre du séminaire pluridisciplinaire organisé par le MUCEM et l’EHESS exposé de la communication suivante :

Le projet commence avec l’état des lieux

Florence Sarano

« Le projet commence avec l’état des lieux » disait Patrick Bouchain (grand prix d’urbanisme) lors de la rencontre sur les résidences d’architectes dans les PNR du 29 mai 2021.

Cette définition s’adressait aux architectes présents, paysagistes et urbanistes ; ces trois disciplines qui sont reliées par la notion de projet, la transformation du monde. Ils sont nommés maitres d’œuvre (maitres de la conception)

Sa définition s’adressait aussi  aux acteurs des PNR et CAUE qui sont autant de commanditaires ou maitres d’ouvrage de projets. (Maitre de l’objet ou du projet)

Plus généralement les architectes utilisent le terme de contexte et de contraintes. Le mouvement moderne lui avait choisit la notion de tabula rasa se situant hors contexte et cherchant a produire des architecture génériques.

Aujourd’hui mes recherches qui s’articulent à mes enseignements notamment en master l’atelier de projet explorent la place de cet état des lieux en lien avec le projet.

Je formule donc les questions suivantes :

  • Comment  faire cet état des lieux ? En quoi consiste-t-il pour qu’il puisse faire projet ?
  • Comment peut-il devenir matière à faire projet ?
  • Pourquoi serait-il déjà le projet ? Serait-il également objet de recherche ?
  • De quelles manières cet état des lieux interroge-t-il aussi la notion de projet architectural particulièrement aujourd’hui ?
  • Commençons par resituer la notion de projeter c’est à dire jeter en avant – imaginer envisager la transformation du monde, concevoir l’avenir ?
  • Le projet est tout autant une démarche : faire projet – qu’une production un édifice /  une production de connaissances.

Je pose le postulat que tout projet s’inscrit aussi dans un projet de société et qu’aujourd’hui particulièrement face aux incertitudes nombreuses de l’avenir la notion de projet prend d’autres dimensions que les architectes ne peuvent ignorer et qui l’engagent aussi à développer des pratiques réunissant recherche et projet mais aussi recherche et action.

Comment définir les projets d’architecture ? comment les enseigner ?

Je vais présenter les ateliers de territoire comme potentiel objet de recherche pour imaginer les manières de faire projet en commençant avec la notion d’état des lieux versus l’analyse en déployant la notion de diagnostic pour définir des  richesses et des conflits / et ensuite définir des enjeux et des opportunités de projet.

ARGUMENTAIRE DU SÉMINAIRE

Le cadrage des problématiques oscille entre perspectives fondamentales et perspectives appliquées sur la base du dialogue de recherche et d’enseignement que nous menons depuis plusieurs années avec Florence Sarano, architecte, enseignante à l’ensam), sur nos métiers respectifs d’anthropologue et d’architecte et sur les façons de les transmettre.

FRÉDÉRIC JOULIAN, anthropologue, EHESS

Mais par-delà ces aspects méthodologiques, l’autre objectif est d’explorer « la geste technique » comme une heuristique originale d’étude de la vie en société (ou en « culture ») qui diffèrerait d’une approche par les croyances, les idées ou le politique et d’aborder cette geste comme une façon particulière de vivre, de travailler et de créer et peut-être de répondre de façon pragmatique aux enjeux de l’anthropocène

Le séminaire « La geste technique : parler objets… par les milieux » s’associe au séminaire « Une autre façon de raconter », afin de réunir de façon plus interactive et réflexive les productions des chercheurs et des dessinateurs. Chacune de ces journées est l’occasion de faire se rencontrer des métiers et savoir-faire originaux sur des enjeux de techniques, d’habitation et de nature. Il s’agit de contribuer, par ces échanges d’expériences, à une réflexion élargie sur les mises en récits graphiques, photographiques et textuels des sciences humaines à l’usage des chercheurs comme du public.

Nous interrogerons donc les savoirs techniques liés aux « milieux de vie des objets » sur différents terrains en PACA (parcs naturels, massifs forestiers des Maures et de l’Estérel, etc.), mais également à l’étranger (Japon, Afrique). La question de la description (textuelle et graphique) et de la collecte « des milieux techniques », et non des seuls objets, nous apparaît aujourd’hui comme un des angles d’entrée les plus pertinents pour relier les recherches « projets », « fondamentales » et « muséologiques » contemporaines.

Florence Sarano dans le Parc de la Ste Baume (Comment penser le projet architectural en relation avec les savoir-faire et les ressources des territoires ruraux) ou Jordan Szcrupak paysagiste (sur le risque incendie et ses bénéfices en terme d’élaboration de projets paysagers) afin de saisir au mieux les potentialités et les limites des savoirs et pratiques locales.

Les exemples sont pris dans plusieurs espaces forestiers confrontés aux enjeux de changement climatique, à ceux de l’écoconstruction, mais aussi, à l’échelle d’objets et de produits issus de différents systèmes techniques (celui de la production traditionnelle de papier au Japon -Joulian, de la réhabilitation de téléphones portables -Nova, Bloch) qui montrent à quel point les savoir-faire gestuels et leurs modes d’actualisation sont sans cesse re-brassés et peuvent par conséquent entrer dans de nouvelles logiques -plus vertueuses et durables- de fonctionnements.

Le faire et le savoir-faire, pris dans leurs dimensions individuelles et spontanées, ou communautaires et ostensibles, se prêtent à différentes mises en récits que nous inscrivons cette année dans les nouvelles formes d’habiter et d’agir sur le monde -locales et durables mais également, comment ces savoirs s’adaptent à la situation de pandémie et « d’empêchement » ; situation qui nous oblige en direct à repenser nos pratiques de terrain (Yann-Philippe Tastevin sur l’innovation technique à Dakar ou Aude Fanlo sur une enquête collecte participative au Mucem).

L’un des objectifs de ce séminaire est d’encourager le dialogue entre muséologues et spécialistes des cultures matérielles en reliant toutes les dimensions envisageables de l’horizon anthropologique (de l’enquête collecte à sa publication ou à son exposition publique).


COMITÉ D’ORGANISATION

Séminaire co-organisé par l’EHESS et le Mucem.

Frédéric Joulian (EHESS), Yann-Philippe Tastevin (CNRS), MarieCharlotte Calafat, Denis Chevallier (Mucem).

Vignes et forêts dans le massif des Maures @ Frédéric Joulian.